Hier j’ai eu l’occasion de me remémorer mon goût pour le voyage lors de mon enfance. Une idée fixe et qui a pourtant bien évolué. Une idée effrayante, car j’ai toujours pensé que la vie c’était travailler, construire une vie à deux, trouver un bel appartement, s’assurer de ne pas manquer d’argent.
En primaire, je me contentais de faire du vélo et de me cacher dans les arbres pour lire. Je lisais les aventures de fantômette. C’était mon héroïne, j’avais même une cape que j’attachais avec une broche en F jaune que j’avais fabriqué. Je ne me souviens pas d’avoir voulu voyager. Mais nous allions tous les ans à Zurich, un vrai voyage avec nuit dans le train. Je n’oublierai jamais les voyages en train de nuit, c’était probablement la meilleure partie de tout le voyage.
Puis j’ai commencé à vraiment beaucoup lire. J’ai découvert Nicolas Vannier et son incroyable voyage dans le nord du Canada avec sa femme et sa fille. Bluffant ! J’ai lu le livre de monsieur et de madame, préférant celui de cette dernière, plus humain, plus quotidien.
A l’aide d’un atlas, je prenais en note l’itinéraire de tour du monde. J’avais décrété que je partirai en 4×4 avec mon mari. Je notais les kilomètres entre chaque étape et les sites touristiques incontournables à visiter. J’avais un super atlas ! Mais je n’étais jamais satisfaite. Je finissais fâchée de ne pas pouvoir tout voir, tout faire. En général je partais du Loiret, faisait le tour de la Méditerranée, le tour de l’Afrique, en commençant par le nord, puis direction le Sénégal, l’Afrique du Sud et je remontais avant de ne pouvoir me décider pour la suite du trajet. Je n’ai que rarement envisagé de commencer par la Russie.
Dans tous les cas je finissais systématiquement par jeter mon planning à la poubelle, trouvant les tours du monde totalement stupides (et je n’ai pas vraiment changé d’avis). Et je recommençais tout quelques semaines plus tard.
Dans mes lectures préférés il y avait la série Médecins de l’impossible de la Bibliothèque Verte. Les aventures d’un médecin et d’une photographe se déroulaient aux 4 coins de la planète, là où les grands drames des années 90 se jouaient (la Bosnie, le Rwanda, etc). C’est probablement ma vraie première découverte du monde, dans toute sa beauté et toute son horreur, sans recul, trop jeune, trop sensible et avec une envie forte de m’engager. Mais comment ? Je créais et vendais un journal au profit d’association humanitaire, mais ça me semblait tellement insignifiant.
Au lycée, fini le 4×4, fini le mari. Je voyagerai seule. Je voulais un appartement proche de l’aéroport parisien (j’ignorais qu’il y avait deux aéroports à l’époque). Pour pouvoir partir facilement. Je me voyais journaliste. C’est ce que je disais à tout le monde. Sans avoir aucune idée de ce que ça voulait dire, je m’imaginais secrètement faire des conférences sur l’Afrique d’aujourd’hui. Mais ce n’était pas un métier, je n’en ai jamais parlé avant de me retrouver étudiante, en première année de swahili, dix ans plus tard.
Toujours pendant mes années lycée, deux jeunes filles de mon âge m’ont convaincue que je pouvais voyager seule : Amy et Simone. La première est australienne, la seconde suisse. Quand elles ont débarqué dans mon lycée comme des ovni, sans vraiment parler français, je leur ai littéralement sauté dessus. Elles avaient eu le cran de quitter leur famille pour venir étudier pendant un an dans un lycée français. Je n’avais ni le cran ni l’argent d’en faire autant. Alors dès que j’avais vent d’un nouvel arrivant, je lui mettais la main dessus. Ce n’était pas difficile, vous en connaissez beaucoup des lycéens mal dans leur peau prêt à discuter en anglais avec des étrangers ? On venait vite me prévenir, car j’étais la seule à vouloir entrer en contact avec les ovni qui défilaient.
Et puis j’ai loupé le concours pour l’école de journalisme de ma région. Je n’ai pas osé tenter Science Po. Mais je suis partie 6 semaines en Australie, mon premier grand voyage ! Comme l’aboutissement d’un rêve, et tout ça, grâce à Amy, littéralement ! J’ai rencontré ses parents, son bébé tout neuf. J’ai été jusqu’en Tasmanie pour rencontrer la famille d’Harriet qui avait passé 6 mois dans mon lycée. J’avais 18 ans.
Je pensais que mon avenir se jouait dans l’orientation que je faisais, dans l’école que j’allais intégré. J’avais voulu être aventurière-journaliste et lors de l’entretien d’admission, j’ai bien compris que je n’en aurai jamais le cran. Je ne suis pas une fonceuse, j’étais convaincue que j’étais faite pour suivre une voie normale, sans aventure et sans journalisme. Je voulais devenir responsable et adulte, je voulais faire ce qu’il fallait faire, comme il fallait.
Je n’aurai jamais cru que j’oserai un jour voyager autrement que pendant mes congés payés !
Que dire ! J’aime beaucoup ton article. Il me touche. Je rêvais aussi d’aventures et de travailler avec les animaux de la savane… Et puis que je ferais le tour du monde. Sans vraiment faire le tour du monde. Passer ma vie à faire le tour du monde. Il est bon de se rappeler nos rêves d’enfance… Je pense qu’il faut en prendre soin.
Merci, j’ai mis du temps à répondre à ton commentaire, car regarder ces rêves d’enfance ce n’est pas toujours facile non plus;
Je crois que c’est mon article préféré 🙂
Merci beaucoup, il a été assez douloureux à écrire. J’ai aussi la tranche de vie suivante d’écrite, mais je ne sais pas si je vais oser la publier.
Très joli article ! C’est toujours intéressant de regarder en arrière pour faire le point, surtout lorsque cela concerne d’anciens rêves… histoire de voir lesquels ne nous disent plus rien, et surtout lesquels on va enfin réaliser 😉
Il y a pourtant beaucoup de rêve que l’on oublie, écrire cet article à ouvert quelques portes de ma mémoire. Un exercice pas toujours facile à faire et assumer.